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[CR CONCERT] Pensées Nocturnes + Au-Dessus + Anus Mundi + Heir au Glazart, Paris (07/11/2017)



En ce mardi bien frisquet de novembre, les amateurs de black metal avaient rendez-vous avec ce groupe un peu bizarre qu'on ne sait pas vraiment comment décrire, Pensées Nocturnes. Ils avaient déjà eu l'occasion d'envoûter Paris en faisant la première partie de Zeal & Ardor. Ils sont revenus ici en maîtres de cérémonie pour nous concocter une soirée à la fois burlesque, dansante, et sombre, très sombre...


Partie I : Heir

Originaire de Toulouse, Heir est un groupe jeune qui officie dans un black/sludge depuis peu. Ils n'ont qu'un album au compteur sorti cette année Au peuple de l'abîme. Ils ont eu ainsi la tâche on ne peut plus difficile de donner le la (aussi guttural soit-il) et ambiancer une salle qui commençait tranquillement à se remplir en ce début de soirée. Et comme les traditions dans le bm et ailleurs perdurent bien comme il faut, ils ont débarqué sur scène sans dire coucou, sans préciser qui ils sont et nous ont vomi leur jus comme ça POUF ! À prendre ou à laisser. Les plus circonspects ont pu passer au merch' ou au bar, d'autres comme moi, ont quand même pris la peine de s'attarder pour voir ce que ça valait.

Je suis arrivée d'une oreille pure et sans préjugés. Très étonnée par la qualité acoustique de cette première partie. En effet, l'ingé-son avait l'air déjà affairé à la tâche, ce qui était vraiment cool pour eux. Nos amis toulousains reflétaient tout ce qu'il avait de plus classique dans le black metal, arborant des toges un peu stylisées pour donner un côté un peu médiévalisant. Mais pas de capuche, les capuches viendront plus tard, il ne faut pas s'enflammer trop vite. Et c'est un peu l'effet que m'a fait la performance de ce groupe. Il y avait de bons riffs, une note sympatoche et entrainante (dans le sens black metal, ne nous emballons pas). Le leader avait l'air à la fois désespéré mais très énervé, son chant guttural plus haineux qu'autre chose. Il nous crachait ses propos pieds-nus, accaparé par son rôle d'évangélisateur de la haine. Et j'avoue que j'ai trouvé ça très sympa à écouter et à voir. Le bassiste a daigné se retourner quelques fois pour regarder le public, mais il était également très concentré à sa tâche. Le côté sludge est effectivement assez perceptible, de par la pesanteur de leur musique. Parfois, ils nous laissaient complètement paumés par des rythmiques lentes et infernales que nous balançait leur batteur en pleine poire. De la mélodie ? Quelle mélodie ? J'emmerde la mélodie. Entre ça et les éclairages non-épileptiques compliant, j'avoue que ça m'a charmé. 

Et comme toutes les bonnes choses ont une fin. Ils ont fini, ils sont partis, BAM ! Démerdez-vous pour le restant de la soirée. À l'image de leur venue quoi. J'en retiendrais qu'ils ont effectivement un fort potentiel, et si je ne me trompe pas, ils ont signé chez LADLO, affaire à suivre donc.



Partie II : Anus Mundi

Anus Mundi fait partie de ces groupes aux avis très tranchés. Soit on aime, soit on déteste. À l'image de son chanteur qu'on peut trouver à la fois génialissime ou totalement antipathique. Ils sont français eux aussi, originaires de Paris et font du black metal sale et dérangeant depuis 2006. À ce jour, ils ont sorti quelques démos et un album Les heures pâles (2013). 

Leur prestation était à l'image de ce que je m'attendais d'eux, à savoir, qu'ils en ont rien à faire de notre tronche et qu'ils jouent pour leur plaisir, et si on peut en profiter c'est bien aussi mais c'est pas vraiment leur but. En arrivant, le chanteur arborant une veste en cuir et une paire de lunettes de soleil, nous a fait savoir tout de suite ce qu'il pensait de nous en nous balançant sa cigarette à la tronche. Bon et bien comme ça nous étions fixés sur la teneur de la soirée. Anus Mundi c'est une musique dérangeante et torturée, mais aussi un peu haineuse de temps en temps. Le groupe alterne brillamment des tempos lents et dépressifs et rapides et saccadés. C'est à peu près de ce que j'avais eu l'impression pour leur peu que j'ai écouté d'eux. L'acoustique m'a semblé un peu meilleure plus en retrait. L'occasion de sortir un peu de cette pesanteur ambiante. Elle est certes saine et salutaire, mais il faut savoir un peu décompresser. J'ai pu remarqué un changement de line-up, il me semblait qu'il y avait une guitariste mais je n'en ai point vu. À voir donc si cela aura duré juste pour la tournée ou bien si ce changement est définitif.

Le dit chanteur n'a pas gardé sa veste bien longtemps, parce qu'il faisait chaud au Glazart, et c'était aussi l'occasion de voir ses nombreuses cicatrices. Ah non, il ne nous aimait pas du tout. Pour le dernier titre il a invité un autre chanteur sur scène. Avec d'autres on avait suspecté un membre de Vortex of End (autre groupe issu de la scène black metal parisienne, une musique agréable au demeurant), mais il me semble que les tatouages ne collaient pas. Il était très énervé, très haineux, tellement qu'il a fini par foncer dans la foule, faisant valdinguer une photographe, et mon tiers de bière restant par la même occasion. C'était clairement voulu. Oui, nous avons peu bougé, mais nous étions à la fois surpris et dubitatifs. Et bien cette conclusion aura eu confirmation de ce qu'on pensait déjà, ils ne nous aiment pas et ne nous aimeront jamais, une bonne baffe à prendre sur le coin de la gueule. Bon, l'air de rien, j'en ri un peu, et puis c'est totalement black metal comme attitude, j'approuve à 100%, d'autant que cette bière n'était pas spécialement bonne.


Partie III : Au-Dessus

Au-Dessus, bien que le nom puisse faire penser à une autre nationalité, est un groupe lituanien originaire de Vilnius. Depuis peu, on en entend souvent parler si on suit un peu les actualités des Acteurs de l'Ombre. Ils font du post-black metal depuis seulement 2014 et ont à leur actif une démo éponyme et un album End of Chapter sorti cette année dont beaucoup, moi y compris, en pensent le plus grand bien. Avec leur pochette énigmatique en total décalage avec le graphisme qu'on retrouve habituellement dans le black metal, ils ont su se faire remarquer par leur singularité. En effet, aussi étonnant que cela puisse paraître, mais sur leur logo, on arrive à lire distinctement leur nom. La magie des groupes de post-black, faut toujours qu'ils fassent leurs intéressants. Mais parce qu'une pochette ne fait pas forcément la qualité d'un groupe (mais ça a le mérite d'attirer le regard), vous comprendrez par la suite qu'Au-Dessus fait bien son boulot, et comme la tradition du post-black le veut, ils font partie de cette veine de blackeux à capuche (Ahhh enfin me diriez-vous) dans un style un peu destroy post-apo mystique (oui tout cela à la fois), rendant la prestation live encore plus impressionnante car ils ne devaient pas y voir grand chose derrière leur capuchon.

C'est donc à l'arrivée d'Au-Dessus que la foule a commencé à nettement s'amasser devant la scène. Comme le veut également la tradition du post-black, le groupe est lui-aussi doté d'une structure arborant l'emblème du groupe. Une sorte de cercle dans un triangle (ou l'inverse comme vous voudrez) avec un croissant retourné à l'intérieur. C'est bien mystique tout ça, me diriez-vous. Et si je vous disais également que la prestation d'Au-Dessus nous aura laissé sens dessus dessous vous en pensez quoi ? Que je joue avec les mots et que c'est vraiment ridicule ? Certes, je plaide coupable. Mais après avoir perdu mon tiers de bière, il me fallait au moins ça pour m'en remettre.

Au-Dessus ne nous a pas dit non plus comment ils s'appelaient. Ils ont tout de suite plongé dans une ambiance à la manière de pros, comme si c'était eux la tête d'affiche que tout le monde attendait. Et là-dessus (Aha !) je m'incline parce qu'ils ont brillamment réussi leur coup. Au final, personne ne les attendait, coller du post-black pour cette soirée était un pari super risqué, ça aurait pu ennuyer ou endormir tout le monde, mais ça a eu l'effet inverse. Ces longues pistes planantes ont eu l'effet inverse sur le public. Ça nous a littéralement captivé et subjugué pendant toute la durée de leur prestation. Et parce le post-black peut se permettre quelques fantaisies, ils arrivent à ambiancer la soirée avec des spots verts et bleus, que personne n'oserait se permettre en temps normal. 

J'ai aimé leur prestation. Ils m'ont confirmé qu'en plus de réussir à sortir un album d'une grande maturité, ils excellent également sur scène. Le batteur aura tenu le choc sans rien voir devant lui et nous en sommes sortis un peu abasourdis. Mais la soirée n'était pas encore terminée, il restait encore l'épreuve Pensées Nocturnes pour nous achever totalement.



Partie IV : Pensées Nocturnes

Pensées Nocturnes, c'est le groupe qu'on m'a conseillé par hasard, arguant le fait que c'était barré et que ça pourrait me plaire. Mais c'est sans compter cet argument imparable : "Toi qui as la phobie des clowns, ça devrait te plaire de voir en live des clowns". Alors, si effectivement à l'écoute de leur album ce n'est pas manifeste qu'on parle de clowns, ça me fait sérieusement réfléchir quant à ma capacité de me confronter à ce qui me terrifie plus que tout. À y réfléchir de plus près, n'est-ce pas l'essence mêmes de nos musiques sombres, expérimentales et dérangeantes que de nous confronter à ce qui nous fait peur ? (Vous avez trois heures pour y réfléchir) C'est vrai, on s'est lassé de ces têtes de moutons, crachats de sang de cochon, c'est devenu commun, vu et revu, ça ne fait plus peur à qui que ce soit, idem pour les corpses paint, sauf à ta grand-mère, et encore, elle t'a déjà vu avec tous tes t-shirts, elle ne s'étonne plus de rien et même à elle plus rien ne lui fait peur. Le sombre est mort, la mort ne fait plus peur, qu'est-ce qu'on fait ? Il reste les clowns. Il n'y a rien de plus flippant qu'un clown, ils ont l'air sympa comme ça, mais faut reconnaître qu'il y a un truc vraiment pas net avec les clowns. Et c'est probablement pour cette raison que cela m'a toujours filé une peur bleue.

Mais revenons à nos moutons, ou nos clowns plutôt. Pensées Nocturnes c'est un projet musical qui surfe sur le black, l'avant-garde, le néoclassique et des trucs chelous et indescriptibles, tellement qu'il faut l'entendre pour comprendre. Ça vient de la tête d'un bonhomme et ça existe depuis 2008. On dénombre pas moins de cinq albums au compteur, dont le dernier À Boire et À Manger date de 2016. Personnellement j'ai eu le coup de foudre en écoutant l'album Grotesque (2010), il m'avait mis sur le cul, et je me demandais encore comment j'arrivais à écouter du black metal à accordéon et à cuivre. Et oui, rien que ça. Bref, ce projet présente un fort potentiel acoustique en album, de ce fait, on se demande un peu ce que ça peut donner en concert. J'ai eu l'occasion de tester en première partie de Zeal & Ardor, je pense que c'était un groupe parfait pour introduire l'univers aussi multi-influencé de notre bonhomme suisse. Comblée par cette prestation qui était plus qu'à la hauteur de mes attentes, ce bm dansant marche terriblement bien sur scène, de ce fait, réitérer l'expérience s'est avéré comme étant une évidence.

Après quelques réglages rapidos, le groupe s'est installé, mettant le public dans l'ambiance avec une bande-sonore digne d'une animation de cirque (qui n'était autre que l'intro "Vulgum Pecus" de l'album Grotesque haha !). Mais nous étions-là pour en prendre plein la vue et les oreilles n'est-ce pas ? L'humeur était à la fête putain de bordel de merde ! Ils ont entamé le set par "Paria", un titre de l'album Grotesque, il n'en fallait pas moins pour me faire plaisir. Le titre opportun au bon moment suffit à me ravir. Après cette tranquille mise en jambes, ils ont enchaîné avec le titre "Le Marionnettiste" issu de l'album Nom d'une Pipe ! Ce titre est une invitation au voyage, à la fois planant et dansant. Je l'aime beaucoup parce qu'il donne envie de se dandiner, ce qui n'est pas du tout black metal, vous en conviendrez n'est-ce pas ? Nous étions cependant trop peu à nous dandiner, et à part ce type visiblement défoncé à je ne sais trop quoi avec son sweat Diapsiquir (qui n'était visiblement pas mort ce soir), l'humeur n'était pas encore totalement à la fête, et c'était fort dommage.

Le set s'est poursuivi par un autre titre de l'album Grotesque, "Râhu". Un titre qui sonnait plus bm au niveau instrumental, mais toujours aussi étrange au niveau vocal. Une sorte de brutalité sourde que j'aime bien. Ils savent aussi faire dans la tradition et j'approuve. Puis après, tout s'est obscurci, laissant place au silence. S'en suit le titre "Monosis" (autre titre de Grotesque, est-ce bien la peine de vous rappeler que cet album est génial ?). Ce titre se conclut dans un silence pesant, ce qui permet au leader et à l'accordéoniste de s'éclipser et de fendre la foule discrètement en jouant comme ils l'avaient déjà fait lorsqu'ils avaient joué en première partie de Z&A . Même si certains étaient sous le charme. On sentait bien que le public était dans une certaine retenue, et c'était bien dommage. D'ailleurs, le leader l'a bien fait savoir et a dit que oui, l'enthousiasme c'était bien mais que ça ne bougeait pas assez.

Mais puisque les choses devaient bien se terminer, à force d'acharnement, le public a enfin compris ce qu'attendait le bonhomme au moment de "Sidrogyne", des danses enflammées se transformant en pogos. C'était festif, violent et sombre à la fois. Nous laissant euphoriques et hors d'haleine. C'est là que je me suis rendue compte que je n'avais décidément plus 20 ans et qu'il était loin, loin, bien loin le temps des circle pits des concerts de punk HxC. Nos amis ont conclu la soirée sur le titre "Les Yeux Boiteux", parce qu'il nous restait encore un peu de jus et que c'était une grande expérience d'amour, de fraternité, et de violence généralisée.

Aussi étonnant que cela puisse paraitre, j'avais eu certes un petit avant goût à Z&A, mais je ne savais pas que du bm pouvait être aussi dansant. J'ai aimé cette ambiance, et j'ai apprécié tout les efforts qu'ont fait le groupe pour qu'on passe une soirée dans la joie et la bonne humeur. J'en suis ressortie lessivée, avec des griffures et des coups je ne sais pas comment, mais ravie, définitivement ravie. Bien entendu, je ne ferais pas cela toutes les semaines, mais c'est aussi bien parfois de pouvoir se lâcher complètement. Merci à eux pour le Spectacle, car j'ai eu le sentiment d'en assister à un vrai avec un grand S, et à la prochaine !

Setlist :

Intro (Vulgum Pecus)
01 - Paria
02 - Le Marionnettiste
03 - Râhu
04 - Monosis
04 - 2 Bals dans la tête
05 - Le Sidrogyne
06 - Les Yeux Boiteux
Outro


Et pour la route, je partage l'affiche de la tournée que je trouve de toute beauté.


Et parce que je suis vraiment sympa et que je m'emballe à mort ( mais jamais trop), un lien d'un concert en bonne qualité et officiel :


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