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[CR CONCERT] Naxatras + Spaceslug + Mr. Bison au Glazart, Paris (01/11/2018)


En voilà une soirée haute en couleurs et en psychédélisme organisé par nos compères de Below the Sun pour ce premier novembre. Les amateurs de stoner s'étaient réunis en nombre pour cette date. On reconnaît un paquet de bobines qui se sont attroupées pour voir les Grecs de Naxatras, mais aussi pas mal (moi y compris) pour le trio polonais hallucinant : Spaceslug. Les Italiens de Mr. Bison avaient quant à eux la lourde tâche de faire chauffer l'ambiance. Le hasard a voulu que l'on commence par le groupe plus énergique et finisse par le plus planant. Et pourquoi pas ? 


Partie I : Mr. Bison

Mr. Bison (j'ignore si ce nom a quelque chose en rapport avec ce méchant très connu de Street Fighter) est un groupe italien originaire de Cecina (ville de Toscane pas très loin de Florence pour ceux dont celle appellation topographique ne dit absolument rien). Ce trio carbure à un stoner de type heavy groovy avec une pointe de blues et un chant assez puisant. On retrouve leurs origines quelque part en 2011 avec la sortie de ce qui semble être une demo/E.P. We don't like love songs (pour des Italiens, ça semble un peu ballot de les voir aussi hermétiques à l'amour !). Depuis, ben ils ont fait leur petit bout de chemin. Avec un album en 2012 We'll be brief, en 2016 Asteroid, et en 2018 Holy Oak qui s'inscrit clairement dans une thématique "nature". Cet album a fait pas mal écho dans le milieu du stoner, et faut reconnaître que leurs riffs sont bien entêtants. Moi-même j'ai eu l'occasion de me risquer à l'écoute de leur album à plusieurs reprises, et de ce que j'en ai entendu, et bien j'ai trouvé ça super sympa. 

Le minimum était donc d'arriver à l'heure pour les acclamer et commencer la soirée en beauté et en son bien chargé. La salle est déjà assez pleine. On ne passe même pas par la case bar et on se dépêche de se trouver un petit coin de fosse qui permet un bon angle de vue sur la scène. Le groupe s'installe ainsi d'un air bien décidé et commence par lancer quelques riffs accrocheurs. Il semble à l'aise dans ce rôle de chauffeur de salle. La formule marche bien, le public semble assez réceptif. Seul petit bémol, nous n'avons malheureusement jamais pu entendre le chanteur durant la prestation du groupe. Autant au niveau instrumental le son était nickel, mais ouais, le chant quoi. J'ai bien vu le vocaliste s'égosiller, mais pas un son, parfois un murmure s'est échappé et parvenu à mes oreilles. Au début j'ai cru à un souci acoustique provenant de ma personne (on ne sait jamais). Mais rapidement, j'ai compris que les autres vivaient également cette tragédie (la suite le confirmera d'ailleurs, on vivra littéralement une soirée en mode [mute] vocalique). Néanmoins, les mecs ont assuré le show comme ils pouvaient. J'ai jamais vu de musiciens changer autant de fois d'instruments. Je pense qu'ils avaient chacun au moins deux ou trois guitares, j'étais d'ailleurs étonnée de ne pas voir le batteur faire de même, ça ne m'aurait pas surpris le moins du monde ceci étant dit en passant, ça aurait juste été un peu compliqué à organiser.

Donc oui, j'étais contente de réentendre les airs qui me sont chers au groupe, mais ça aurait été bien aussi d'avoir un peu de chant. Je me suis consolée comme je pouvais sur l'orchestration qui était plutôt pas mal en comparaison. Je ne suis pas assez experte pour dire si ça valait la peine de les voir changer d'instruments, mais on saluera l'effort du groupe qui a mis beaucoup d'énergie pour nous concocter une première partie de soirée fort sympathique. Je me suis contenue difficilement, voulant me préserver pour Spaceslug. À la fin du set, nous avons pu entendre une partie pseudo acoustique, et là nous avons enfin entendu le chanteur. Bref, il chantait bien "à ce moment-là". Vaut mieux en rire qu'autre chose. Mais je pense que l'ingé son a dû bien prendre cher à la fin de la soirée. Le groupe disposait d'un merch assez bien achalandé, je suis repartie avec un sticker, que j'ai perdu, mais je suis repartie avec quelque chose, et j'ai pu en profiter pour saluer les bobines connues et m'impatienter telle une groupie hystérique à l'idée de pouvoir voir enfin Spaceslug. Mr. Bison reste une valeur sûre qui vaut carrément le détour. 



Partie II : Spaceslug

Par où commencer ? Spaceslug c'est un de mes gros coups de cœur de cette fin d'année 2018. Le hasard a voulu que je tombe sur eux lors d'une lecture d'albums aléatoire suggérée par cette génialissime chaîne Youteub Stoner Meadow of Doom. Je suis tombée sur le dernier album Eye The Tide (2018). C'est un album génial et surprenant car il évolue crescendo dans une tonalité agressive qu'on ne présageait pas dans sa première moitié. Voilà pourquoi je l'ai aimé. J'ai donc par la suite commencé par le début de leur disco et je me suis rendue compte que j'aimais tout d'eux et que j'étais probablement en train de devenir une groupie assez virulente, prêchant ma bonne parole acoustique à qui voulait bien l'entendre (ou pas). La particularité de ce trio, en dehors du fait qu'ils sont polonais (et putain, vous connaissez beaucoup de groupes polonais qui ne font pas du black metal, vous ?) c'est que chaque musicien est potentiellement vocaliste. C'est donc pour cela qu'on a le droit à une harmonie assez particulièrement et pour le moins planante. Bref, le chant de Spaceslug est envoûtant, mais l'apparition du guttural au dernier album est d'autant plus appréciable. Je ne remercierai jamais assez le guitariste d'avoir innové sur ce terrain-là. Mais je m'emporte. 

Donc, alors ils sont Polonais, originaires de Wroclaw. Non, mais le plus hallucinant, c'est ce premier album en février 2016 Lemanis, un chef d’œuvre. Franchement, je n'ai jamais été autant fan des pochettes avec des limaces de l'espace depuis la rencontre avec ce groupe. Février 2017 deuxième album Time Travel Dilemma. Un E.P. en septembre 2017 Mountain & Reminiscence on quitte les limaces aux couleurs un peu édulcorées pour des tonalités plus darky (on le voit venir, il n'est pas encore là le chant guttural, mais l'esprit est là) et juillet de cette année, soit un mois après sa sortie, j'ai fait connaissance avec le groupe. La boucle est bouclée. Je suis devenue fan. Le mieux, c'est vu qu'il n'y a rien à jeter, de lâcher directement 20 balles pour la disco et on en parle plus. Admettons aussi que ce groupe a une productivité de dingue, parce que des titres des stoner c'est un peu long. Et trois albums et un E.P. en un peu plus de 2 ans, c'est quand même des sacrés stakhanovistes de la musique. J'approuve, car si la production reste bonne, on ne peut que se délecter à l'idée de leurs sorties. 

Mais revenons à nos moutons, enfin, nos limaces. Tout le monde sait que j'étais franchement intenable avant le concert et que je ne parlais que de ça. Je comptais les jours, les heures, les minutes. Bref. Quand fut venu le moment de cette prestation Spaceslugesque, je répondais plus de rien. On finit sa première pinte rapidos, on remet ses bouchons, on se faufile dans la foule qui s'est davantage étoffée. Nous étions pas les seuls à avoir eu cette idée. Moi je pense bêtement qu'il y a beaucoup de monde pour un jour de semaine, même si c'est un jeudi, et puis on me rappelle que c'est aussi accessoirement un jour férié. Oui, bon, oui bon. Le public est sympa, les photographes compréhensifs, chacun peut se caler un bout de fosse, de manière à être au plus près des musiciens. 

Le groupe commence par un titre plutôt planant pour nous plonger dans l'ambiance. Cette scène semble bien grande pour ce trio introverti, mais on fera comme si nous étions à une soirée privée. Je ne regarde pas ce qui se passe derrière moi, mais je suis subjuguée par le guitariste, le bassiste étant trop loin, il faut bien se concentrer sur quelque chose. Instrumentalement parlant, le son est nickel, par contre, là encore niveau chant, ça merde grave. On n'entend rien ou presque. Des gens à côté de moi également venus pour le groupe gueulent, "More voiiiice !" les musiciens un rien perfectionnistes essayent d'arranger au moins l'instrumentalisation du bouzin. On n'aura pas eu gain de cause pour ce qui est d'avoir plus de chant. On est affreusement déçus. Sur ce point, ils n'y pouvaient pas grand chose, alors on s'est consolés comme on a pu. 

La magie Spaceslugienne a fait son effet dans le public, entre chaque titres (qui dure bien longtemps), le groupe est chaudement acclamé, ils ont eu raison de faire le déplacement. Nous reconnaissons bien tous les morceaux, qu'ils revisitent un brin mais pas trop. Ils nous produisent un panaché des quatre album pas dégueu. On a le droit à du chant guttural et clair de toute beauté, même si quasiment pas audible. Nous nous contenteront de ça, et de toutes les façons, niveau instruments c'est des bêtes alors on leur pardonnera. On s'est probablement tous enflammés intérieurement, car Spaceslug est une musique d'introspection, elle se partage tout juste en croisant furtivement les regards de nos voisins de fosse, mais c'est tout. Humblement, ils nous remercient d'être venus. Nous rectifions le tir et les remercions eux, d'être venus.


Partie III : Naxatras

Et on arrive enfin à la tête d'affiche de la soirée. Ce n'est pas tant que je ne les attendais pas, mais  j'étais bien gentiment lessivée après Spacelug. Faisons un rapide tour d'horizon de ces amateurs de stoner et rock psyché. Si on jette un coup d’œil sur leur Bandcamp, on peut lire qu'ils se décrivent comme étant : "a hard psychedelic rock band from Greece." Nous avons là encore un trio, originaire de Thessaloniki. Curieusement ils sont en fait plutôt jeunes, ils carburent dans le genre depuis seulement 2015 et ont trois albums et un E.P. à leur actif. Les albums s'appellent respectivement Naxatras (2015), II (2016) et III (2018) (question originalité, on pourrait presque croire qu'il s'agit d'un projet de black metal). J'avais surtout jeté une oreille attentive au premier et second album, pour me faire à l'idée que c'était très bien. J'en profite pour ajouter qu'ils ont également mis en ligne des vidéo live de très bonne qualité, autant visuelle qu'acoustique. Foncez donc vous abreuvez sur youteub de leur univers, ça vaut le détour !

Nous nous calons donc bien tranquillement en retrait, notre pinte à la main pour apprécier la magie acoustique de Naxatras. Je pense d'ailleurs que c'est probablement la meilleure manière de l'apprécier, pépère posé sans pression, à l'image de leur musique, en gros. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'en gros, ce n'est pas violent du tout. Loin des gros riffs et de la basse surchargée, Naxatras nous invite tout en douceur et en poésie dans leur univers acoustique. Je me suis gentiment laissée bercée par leurs accords, leur côté blues et psyché. Un peu plus et j'aurais pu taper joyeusement un roupillon, si, comme c'était le cas avant, il y avait encore ces banquettes au Glazart. Mais des banquettes il n'y en a plus. On a le droit à des bidons pour poser nos bières, là encore, on se contentera de ça. La musique de Naxatras et à grande majorité instrumentale, exit donc le drame du "pas de chant" comme on avait malheureusement vécu lors des précédentes prestations. La foule est tantôt captivée, tantôt mouvantes, nombre de gens font des allers-retours, ils ne tiennent pas en place. Notre point de vue est amusant, on assiste à un concert d'une musique planante et prenante, mais également à une sorte de défilé de personnalités tous aussi atypiques et curieuses. J'aime ce mélange de style et de personnalités. Ne l'avais-je pas déjà dit que le stoner était une grande famille de joyeux lurons ?

La musique de Naxatras est captivante pour deux raisons. La première c'est que les musiciens sont bons. La deuxième c'est que leurs morceaux trainent en longueur et qu'on croit toujours à un moment que c'est la fin, mais en fait non, c'était une feinte et du coup, le morceau continue alors même que quelques badauds se risquent à applaudir. Bref, je trouve ça amusant, j'ai passé une bonne partie de la soirée à dire "Et non, ce n'est pas fini !" pour le plus grand plaisir de mon acolyte qui trouvait ma blague très drôle, ou peut-être aussi, parce qu'il n'avait pas le choix et que c'était moi qui l'avait fortement incité à venir, et par conséquent, les blagues pourries étaient comprises dans le set.

Vous l'aurez compris. Malgré les aléas ingé-sonores, on ne peut plus regrettables, nous avons tout de même passés une très très bonne soirée en ce premier novembre. Pas morbide du tout d'ailleurs, joyeuse, elle suintait l'amour et l'amitié (qui, contrairement à ce que certains peuvent dire, ne sont pas des maladies). J'ai pu apercevoir tous ces musiciens ravis et enjoués. Cerise sur le gâteau, au moment de partir, je croise un type arborant un sweat Bathory (oui, moi et le black metal), l'air un peu ténébreux, et là, je le reconnais, c'est le guitariste de Spaceslug, je me risque à un "Hey you !", il me regarde, vu que j'ai passé une bonne partie du concert juste en face de lui, il comprend où je veux en venir, j'ajoute "Thank you", il me salue humblement, tout à fait son genre, et je repars, telle une groupie satisfaite. Il sait qu'il m'a fait passer une bonne soirée, et ça, c'est le principal, non ?


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